CHAP. III – LE JUDAÏSME
Quelques connaissances du judaïsme sont essentielles à l’étudiant de la Bible, car le christianisme en est issu. Les livres du Nouveau Testament, à deux exceptions près, sont l’œuvre de Juifs. Beaucoup des enseignements du Nouveau Testament ont leur origine dans l’Ancien, qui y est cité de nombreuses fois. L’autre part, Jésus était un Juif et a observé les coutumes de son peuple.
A. L’ORIGINE
Le judaïsme du premier siècle fut largement le produit de l’exil. Avant la captivité la loyauté des Israélites à la loi fut intermittente. Ils couraient souvent après des faux dieux. La captivité les a mis devant une alternative sévère : ou ils se donnaient entièrement à l’adoration de Jéhovah, le seul /rai Dieu, et gardaient ainsi leur génie et leur raison d’être nationale, ou bien ils se laissaient absorber religieusement et politiquement. Ils ont choisi la première. C’est à Babylone, où les captifs du royaume du Sud séjour-laient, que le judaïsme a commencé à prendre forme. L’idolâtrie fut bannie, .e livre de Daniel témoigne du mépris des cérémonies païennes. Avec la cessa-;ion des sacrifices imposée par la nécessité, la loi, ou torah, a commencé à prendre une place prépondérante. Dans les royaumes d’avant l’exil, le fidèle individuel s’appuyait probablement en grande partie sur sa participation au culte public comme expression de sa foi. C’était peut-être sincère mais cela le pouvait être aussi vital qu’un étude personnelle des préceptes de la loi de Dieu.
Un nouveau centre d’adoration fut établi avec la création de la synagogue. La dispersion du peuple dans la captivité ainsi que leurs voyages dans les innées qui suivirent, ont rendu nécessaire une forme d’assemblée locale. Afin Je les unir autour de la loi, on formait une congrégation régulière (appelée synagogue) toutes les fois qu’on trouvait dix hommes. Là Juifs et prosélytes s’assemblaient le septième jour pour prier et adorer Dieu. La synagogue a été si fermement établie comme institution qu’elle a continué même après la reconstruction du Temple.
B. LA THEOLOGIE
Au centre de toute la foi du judaïsme était sa croyance tenace à l’unité et à .a transcendance de Jéhovah. Les païens les accusaient d’athéisme, non parce qu’ils niaient l’existence de tout Dieu, mais parce qu’ils refusaient de reconnaître la réalité de toute autre divinité que la leur. Les Rabbins accentuaient beaucoup aussi l’enseignement de paternité de Dieu. Dieu était leur >ère, ils étaient ses enfants. L’homme, selon la théologie juive, était la création de Dieu, doué de la capacité de choisir entre le bien et le mal et ainsi, comme conséquences, la vie et la mort. Le but principal de l’homme dans la vie était de garder les commandements de Dieu et de pratiquer tous les rites établis pour le peuple. Le péché était principalement une mauvaise relation envers la loi, soit dans les choses “lourdes” ou dans les “légères”. Il n’était fait aucune distinction entre la loi morale et la loi cérémonielle. Il n’y a que des allusions à la résurrection dans l’Ancien Testament (Ps.16:10,11; Esaîe 26:19; Dan. 12:2). Dans les écrits apocryphes et apocalyptiques il y en à davantage.
L’attente messianique fut également un élément fort de la période qui sépara les deux testaments. Le mot “messie” veut dire tout simplement “oint”. Il a été appliqué à des personnes aussi diverses que les patriarches, le souverain sacrificateur, Cyrus roi de Perse, mais peu à peu il s’est vu réservé à “un fils de David”. C’est Dieu qui a donné cette espérance à l’homme mais l’homme l’a déformée au point de ne pas reconnaître le messie à son apparition. La Bible prophétise la venue d’un prophète-prêtre-roi qui souffrirait avant d’Être glorifié. Les Juifs pourtant n’attendaient qu’un roi plein de gloire qui rétablisse leur souveraineté nationale et leur donne un royaume plus grand et plus glorieux que celui de Salomon.
C. LE TEMPLE
Le Temple originel de Salomon fut détruit lors du sac de Jérusalem en 586 avant J-C. Le second fut construit lors de la restauration mentionnée par Aggée et Zacharie. On l’a commencé en 537 et achevé en 516. On sait peu de l’histoire de ce temple. Antiochus Epiphane l’a pillé et profané par l’introduction d’un autel à Zeus (Jupiter) sur lequel il a offert des sacrifices. Trois ans plus tard Judas macchabée l’a purifié et réparé. Quand Hérode le .Grand prit la ville en 37 une partie des bâtiments du Temple fut brûlée, mais l’édifice principal ne subit probablement pas de dégât. Pourtant Hérode, dans la dix-huitième année de son règne (20 ans av. J-C), entreprit la reconstruction du Temple. On avançait lentement pour éviter de bouleverser l’adoration des fidèles. Les sacrificateurs faisaient le travail. Le sanctuaire fut achevé en un an et demi, mais les autres bâtiments et les portiques ne le furent qu’en 62 apr. 3-C. Les ennemis de 3ésus affirmèrent que le Temple était en construction depuis quarante ans, indiquant que le travail continuait à ce moment-là (3n 2:20). Le bâtiment principal était de marbre blanc dont une bonne partie était recouverte d’or. C’était un édifice imposant. La disposition du Temple môme était semblable à celle du Tabernacle. Les sacrifices se faisaient selon les indications de l’Ancien Testament. Il y avait des cours qui l’entouraient. Les Romains permettaient aux Juifs de maintenir un corps de police pour maintenir l’ordre dans les limites de l’enceinte du temple. C’était le centre du culte à Jérusalem. Jésus lui-même, et plus tard les apôtres, prêchèrent dans ses parvis.
D. LA SYNAGOGUE
La Synagogue jouait un rôle important dans le judaïsme. Les Juifs en fondaient une partout où ils étaient en nombre suffisant pour la maintenir sur pied. La Galilée, qui à l’époque des Macchabées était largement païenne, était remplie de synagogues au temps de Christ. La synagogue était le centre social où les habitants juifs d’une ville se réunissaient toutes les semaines pour se voir. C’était le moyen éducatif par lequel on gardait la loi devant les gens, le lieu où l’on instruisait les enfants dans la foi de leurs aïeux. C’était un remplacement pour le Temple. Là l’étude de la loi remplaçait le rite du sacrifice, le Rabbin se substituait au sacrificateur.
Le service constituait en une récitation du credo juif (Deut. 6:4,5) accompagnée d’expressions de louanges. Après le credo ou Shema venait une prière rituelle suivie d’un moment de silence pour la prière silencieuse des membres. Ensuite venait la lecture des Ecritures. On avait divisé le Pentateuque en 54 leçons qu’on lisait en un laps de temps fixe. Pour les Juifs de la Palestine c’était trois ans. Pour ceux de la Babylone un an. On lisait aussi les prophètes (Luc 4:16). Un sermon suivait et on terminait avec une bénédiction prononcée par un membre de la branche sacerdotale s’il y en avait un. Sinon on la remplaçait par une prière.
E. L’ANNEE SACREE
L’année juive comportait douze mois lunaires avec un mois intercalaire nécessaire pour la faire accorder avec l’année solaire. L’année religieuse commençait avec le premier mois, l’année civile avec le septième.
Elle contenait sept fêtes principales : La Pâque (suivie des jours des pains sans levain), la Pentecôte, les Trompettes, l’Expiation, les Tabernacles, la Dédicace et le Purim. Cinq d’entre elles- sont prescrites par la loi mosaïque. Les deux autres sont post-exiliques d’origine.
F. LE SYSTEME D’EDUCATION
Parmi les Juifs de la dispersion, l’éducation a dû prendre une place importante assez tôt; car ils en dépendaient pour la perpétuation de leurs convictions nationales. Ce n’est qu’ainsi qu’ils pouvaient garder leur identité nationale. Cette instruction dans la loi et dans sa signification formait une espèce d’éducation d’adultes. A côté de la Synagogue s’est développée l’école. L’instruction n’a jamais été obligatoire en Israël comme en Europe aujourd’hui, mais la communauté juive dispensait d’ordinaire quelque instruction pour apprendre aux enfants à lire la loi, à écrire et à faire le calcul simple.
A l’époque du Nouveau Testament l’état avait fondé des écoles pour les garçons. L’instruction était limitée mais complète dans les matières offertes. Avant d’aller en classe l’enfant apprenait le shéma ou credo des Juifs. Il apprenait par cœur des passages de la loi; certains proverbes communs; des psaumes choisis. En classe le maître leur faisait répéter les paroles de la loi. Le maître s’asseyait sur une petite estrade, les élèves en demi-cercle devant lui. Quand le garçon avançait on lui donnait de l’instruction dans le Mishna et le Talmud.
L’éducation juive était étroite mais précise. L’élève apprenait à faire de fines distinctions de définition et à se souvenir exactement de ce qu’il avait appris. Il savait interpréter la loi de toutes les manières possibles. On n’encourageait pourtant pas la pensée indépendante ou la recherche scientifique. Les Rabbins au temps de Jésus étaient très astucieux dans l’interprétation de points minutieux de la loi et dans la résolution de questions casuistiques. Ils faisaient peu de cas de la connaissance du monde naturel, qui occupe un si grande place dans le programme moderne. Lés Juifs soutenaient l’éducation professionnelle. Les Rabbins disaient “celui qui n’enseigne pas un métier à son fils fait de lui un voleur”. Le métier contrebalançait les efforts intellectuels et permettait au jeune homme de trouver un emploi. En principe on excluait les filles de l’instruction. On leur enseignait les arts ménagers à la maison en préparation pour le mariage.
G. LA LITTÉRATURE
Plus que toute autre nation de l’antiquité, les Juifs étaient le peuple d’un livre. D’autres ont pu posséder une littérature plus vaste ou plus variée mais aucune n’a été plus attachée à ses écrits nationaux que les Juifs à la Loi.
L’influence des Ecritures juives canoniques sur le Nouveau Testament est si évidente qu’il n’est point besoin d’en parler.
Il y en avait d’autres, qui n’ont jamais été reçues comme canoniques par qui que ce soit. Certaines d’entre elles appartiennent à la classe de littérature dite “Apocalyptique” (Hénoc, Assomption de Moïse, etc.). Cette littérature est prophétique, généralement remplie de symboles grotesques et souvent inconsistante. Elle prophétise les pires jugements physiques sur les méchants, dont les justes seront délivrés par l’intervention miraculeuse de Dieu. On trouve souvent des anges en action dans le drame apocalyptique. Une bonne partie des livres apocalyptiques sont pseudonymes ou attribués à des hommes qui n’ont pas pu les avoir écrits, par exemple le livre d’Enoch. Dans la Bible les livres d’Ezéchiel, Daniel et Apocalypse présentent certaines caractéristiques similaires,
H. LES SECTES DU JUDAÏSME
Le judaïsme, comme toute l’humanité, avait ses sectes. Toutes donnaient leur loyauté à la loi de Moïse mais leurs points de vue allaient du libéralisme au nationalisme, du mysticisme à l’opportunisme politique.
Les pharisiens
La plus grande et la plus influente des sectes du temps du Nouveau Testament était celle des pharisiens. Leur nom vient du verbe PARASH “séparer”. C’étaient les séparatistes ou les puritains du judaïsme, qui se retiraient de toute association mauvaise et qui manifestaient une obéissance complète à chaque précepte de la loi orale et écrite. Ils ont eu leur origine comme groupe séparé peu après l’époque des Macchabées. Déjà en 135 av. D.C, ils étaient bien établis dans le judaïsme. Leur théologie se basait sur le canon entier de l’Ancien Testament, qui comprenait la loi de Moïse, les prophètes et les Ecrits. En interprétation ils suivaient la méthode allégorique pour permettre un peu d’élasticité. Ils attachaient beaucoup d’importance à la loi orale ou la tradition qu’ils observaient scrupuleusement. Ils croyaient aux anges et aux esprits, à l’immortalité de l’âme et à la résurrection du corps. Ils pratiquaient la prière et le jeûne rituel et donnaient la dîme de leur revenu méticuleusement. Ils gardaient leur sabbat très strictement, ne permettant même pas la guérison des malades ou la cueillette du grain en passant pour manger ce jour-là. Quoiqu’il y ait eu beaucoup de pharisiens si introspectifs dans leur désir d’obéir à la loi qu’ils sont devenus ce qu’on appelle aujourd’hui pharisaïques, c’est-à-dire occupés à leur propre justice au point d’être hypocrites, beaucoup d’entre eux étaient vraiment vertueux et des hommes de Dieu. Ils n’étaient pas tous des hypocrites. Notez dans le Nouveau Testament des hommes comme Nicodème et Joseph d’Arimathée et même Saul de Tarse.
De toutes les sectes du judaïsme elle est la seule à avoir survécu. Elle est à la base du judaïsme orthodoxe moderne.
Les Sadducéens
Le nom des sadducéens vient, selon la tradition, des fils de Sadok, qui était souverain sacrificateur au temps de David et de Salomon. Ces hommes furent sacrificateurs pendant la captivité et apparemment le nom a subsistécomme titre du parti sacerdotal aux jours de Christ, moins nombreux que les pharisiens, ils détenaient la puissance politique. C’était le groupe qui gouvernait la vis civile du judaïsme sous les Hérode.
Comme secte du judaïsme les sadducéens adhéraient strictement à l’interprétation littérale de la Loi, qu’ils croyaient seule être canonique, ayant une plus grande autorité que les prophètes et les Ecrits. Il n’y avait donc pas de place chez eux pour la tradition orale, qui faisait les délices des pharisiens. Par contre ils étaient des rationalistes niant l’existence des anges et des esprits et ne croyant pas à l’immortalité de l’âme. Leur religion était froidement éthique et littérale, donc plus ouverte aux influences helléniques que le pharisaïsme. Politiquement les sadducéens étaient des opportunistes et s’alliaient facilement aux puissances dominantes s’ils y trouvaient leur avantage. Ils n’ont pas survécu à la destruction de Jérusalem, Avec la cessation du sacerdoce et l’arrivée de l’hostilité romaine, leur existence comme groupe a pris fin.
Les Esséniens
On sait très peu de cette secte. C’était une fraternité ascétique. On y entrait seulement si on était prêt à se soumettre au règlement du groupe et à passer par des cérémonies d’initiation. Ces gens avaient tout en commun et travaillaient manuellement pour subvenir à leurs besoins. Ils mangeaient la nourriture la plus ordinaire et s’habillaient en blanc quand ils ne travaillaient pas. Ils étaient sobres et observaient le sabbat strictement. Tout écart des règlements du groupe était puni par l’expulsion. Théologiquement ils ressemblaient aux pharisiens. Certains pensent que Jean-Baptiste était un essénien, mais à part son ascétisme il n’existe aucune indication de cela.
L’existence des esséniens est apparue avec la découverte des rouleaux de Qumran, une ancienne communauté essénienne au sud de Jéricho et sur les hauteurs dominant la mer Morte. Les rouleaux datent du premier siècle avant et après J-C. Lorsqu’on fit l’excavation des lieux, on découvrit les restes de la vie d’une communauté : citernes, réfectoires et dortoirs. On trouva parmi les documents des manuels de la société.
Les Zélotes
Les Zélotes n’étaient pas une secte religieuse du môme genre que les autres. C’était un groupe de nationalistes fanatiques qui prêchaient la violence comme moyen de libération de Rome.
La Dispersion
Quoique la Palestine ait .été traditionnellement la patrie de Juifs, au temps du Nouveau-Testament le plus grand nombre des Juifs vivaient en dehors des limites du territoire. On les trouvait dans toutes les grandes villes depuis Babylone jusqu’à Rome et dans beaucoup de petits endroits aussi, partout où le commerce ou la colonisation les avaient amenés. Dans la dispersion il y avait deux groupes distincts : Les hébraïstes et les hellénistes.
Les Hébraïstes
Paul, qui en était un, les mentionne (Phil. 3:5). Ils étaient des Juifs qui conservaient non seulement la foi religieuse du judaïsme, mais aussi l’hébreu ou l’araméen comme langue ainsi que les coutumes hébraïques de la dispersion.
Les Hellénistes
Le plus grand nombre des Juifs, pourtant, avait adopté la culture gréco-romaine et avait cessé d’être juif en tout sauf quant à la foi. Ils parlaient grec ou tout autre langue où ils habitaient et pratiquaient les coutumes de leurs voisins. Dans bien des cas on avait de la peine à les distinguer comme Juifs. On mentionne les deux groupes en Actes 6.
Questions et devoirs
Niveau 1 – Etudiez la leçon Répondez aux questions 1-8 Niveau 2 – Etudiez la leçon Lisez Manley, p 293 – 296 ; 265-274 répondez aux questions 1 à 10 Niveau 3 – En addition au travail du niveau 2 répondez aux questions 11 |
- Pourquoi faut-il des connaissances du judaïsme ?
- Quand, où et pourquoi le judaïsme a-t-il commencé ?
- Quels sont les points essentiels de la théologie juive ?
- Quelle sorte de messie les Juifs attendaient-ils ?
- Combien de temples a-t-on eu à Jérusalem ? Qui les a construits ?
- Nommez quelques éléments distinctifs de l’éducation juive.
- Comparez le service de la synagogue à nos réunions.
- Définitions : a. Judaïsme b. Synagogue c. Hellénisme d. Dispersion e. Sadducéen f. Pharisien
- Nommez les fêtes juives principales avec leur origine et leurs caractéristiques principales. Lesquelles se célébraient uniquement à Jérusalem
- Lisez Manley pp. 272-274. Est-ce une preuve concluante que Jésus était le messie ? Si, oui, pourquoi les Juifs ne l’ont-ils pas reconnu ?
- Lecture supplémentaire, de Pressensé pp. 288 – 312.