CHAP. VII – LUC
L’ORIGINE
Des trois synoptiques c’est Luc qui donne le plus de renseignements au sujet de l’origine de son évangile. Dans une introduction littéraire il définit but, sa méthode et sa relation avec ceux qui avaient entrepris le même travail. Cette introduction (1:1-4) est la clef du livre. On peut tirer plusieurs conclusions basées sur elle :
1. Au temps de l’auteur il existait plusieurs œuvres contenant des récits partiels et peut-être faussés de la vie et de l’œuvre de Christ. L’auteur n’aurait pas écrit le sien s’il avait été entièrement satisfait de ces derniers.
2. Dans ces récits on avait essayé de faire un arrangement systématique des faits disponibles (“composer un récit” – 1:1).
3. Le peuple chrétien connaissait et acceptait ces faits indépendamment de ces récits. Luc dit qu’ils “se sont accomplis parmi nous”.
4. L’auteur se savait aussi bien renseigner que les autres et aussi capable d’écrire une telle relation (“il m’a semblé bon, à moi aussi”).
5. Il avait obtenu ces renseignements de sources officielles compétentes (“ont été des témoins oculaires”).
6. Il connaissait les faits soit par observation ou par enquête. Il était contemporain de l’action principale dans le sens qu’il a vécu dans la même génération que ceux qui en avaient témoigné. Il a tout “recherché exactement depuis les origines”.
7. La connaissance de Luc couvrait tous les faits principaux. Son évangile contient beaucoup de détails qui manquent aux autres. Il est généralement plus représentatif de la vie de Christ.
8. Il a proposé d’écrire exactement et en ordre logique. L’expression “d’une manière suivie” ne veut pas nécessairement dire en ordre chronologique, mais elle veut dire qu’il avait un plan et qu’il avait l’intention de le suivre.
9. Le destinataire était probablement un homme de la haute société que Luc appelle peut-être par son nom baptismal, Théophile, qui veut dire “celui qui aime Dieu” ou “celui qui est aimé de Dieu”. L’expression “excellent” ne s’appliquait généralement qu’aux fonctionnaires élevés ou aux membres de l’aristocratie. Ce personnage était peut-être un converti de Luc.
10. Le destinataire avait déjà reçu une instruction orale concernant le Christ, mais il avait besoin d’instruction supplémentaire pour le fortifier et le convaincre totalement de la vérité.
11. Le but évident de Luc est de donner une connaissance complète de la vérité à son ami.
Tout ceci nous amena à la conclusion que l’auteur était un homme qui possédait des dons littéraires et qui savait s’en servir pour présenter le message de Christ. Qui était-il ?
L’auteur
L’identité de l’auteur dépend de sa relation au livre des Actes. Si Luc et Actes ont été écrits par la même personne, on peut appliquer à Luc l’évidence interne du livre des Actes et inversement. D’après ce livre l’auteur était participant de beaucoup des événements qu’il décrit, car il emploie souvent le mot “nous”. Ces passages où il emploie le “nous” sont très utiles pour déterminer quels sont les intérêts, le caractère et l’identité possible de l’auteur.
La première de ces sections commence avec Actes 16:10, avec le départ de Paul à Troas lors de son deuxième voyage missionnaire. L’écrivain l’accompagne de Troas à Philippe où les références à la première personne du pluriel cessent avec l’emprisonnement de Paul (16:17). L’auteur était probablement présent mais pas arrêté. Les sections avec “nous” recommencement avec le retour de Paul en Macédoine (Ac. 20:6). A partir de là elles continuent jusqu’à la fin du livre. L’auteur ne semble pas paraître pendant l’emprisonnement de Paul à Césarée, mais il l’accompagne à Rome (27:1) et reste avec lui jusqu’à la fin du récit.
La relation entre Luc et les Actes est étroite. Les deux documents s’adressent à la même personne, Théophile. L’introduction des Actes s’accorde parfaitement avec le contenu de l’évangile quand il est dit que le premier livre parlait de “tout ce que Jésus a commencé de faire et d’enseigner”. L’accent mis sur la résurrection et le ministère d’enseignement pendant les quarante jours s’accorde avec le message de Luc 24. La position des Actes sur le Saint-Esprit est pareil à celui de l’évangile. I1 y a un accord étroit entre le style et le vocabulaire des deux écrits. Ces choses, et bien d’autres, font paraître l’unité en Luc et Actes. Les faits qui désignent l’autour dos Actes le font également pour celui de Luc.
En bref, il était un païen, de langue maternelle grecque. Il avait reçu une bonne instruction et semble avoir eu une capacité intellectuelle assez élevée. Il était probablement un des premiers convertis de la mission à Antioche en Syrie. Nous ne savons rien de sa vie jusqu’à ce qu’il rencontre Paul à Troas en 51 environ. De Troas il accompagne Paul en Macédoine où il devient le pasteur de l’église de Philippe, une église qui s’est distinguée pour son zèle et sa loyauté envers son fondateur. Il se peut que le “frère” mentionné en 2 Cor. 8:22 soit une référence à Luc. Peut-être aussi était-il un frère selon la chair de Tite, qui lui était lié à l’église d’Antioche très tôt (Gai. 2:3).
Quand Paul est retourné à Philippe dans son troisième voyage, l’auteur de Luc-Actes l’a rejoint et est allé en Palestine avec lui. Pendant le séjour à Jérusalem et l’emprisonnement à Césarée on ne le mentionne pas, mais il n’a pas dû être loin; car il accompagne Paul a Rome. Parmi tous les compagnons de Paul il n’y a que Luc qui réponde à toutes ces conditions. La tradition externe soutient cette conclusion que Luc, le médecin et ami de Paul, est l’auteur do l’évangile selon Luc.
Date et lieu
II y a deux limites qui fixent la période dans laquelle on a dû écrire le troisième évangile : avant Actes et après le point où le développement du christianisme aurait attiré l’attention d’un païen comme Théophile. Actes a certainement été composé avant la fin du premier emprisonnement de Paul à Rome, car il se termine brusquement, comme si l’auteur n’avait plus rien à dire pour le moment. Il fut écrit évidemment après la mort de Jésus, un temps suffisant s’était écoulé pour permettre à plusieurs d’entreprendre un récit de sa vie. L’année 60 paraît peut-être une bonne date moyenne. Luc aurait été converti depuis une dizaine d’années. Il aurait voyagé en Palestine pour rencontrer eaux qui ai/aient connu Jésus dans la chair. Il est même possible qu’il se soit occupé de faire ses recherches en Palestine pendant l’emprisonnement de Paul à Césarée.
Il n’y a aucun indice au sujet du lieu de composition. C’était probablement en dehors de la Palestine, quoique peut-être à Césarée. Toutes les autres suggestions ne sont que des spéculations. Il n’y a môme pas une bonne tradition au sujet du lieu de son origine.
Contenu
L’organisation générale de Luc suit le cours des événements tel qu’il est indiqué en Matthieu et Marc, avec plusieurs additions spécifiques à cet auteur. Les récits de la naissance de Jean-Baptiste, de la naissance et de l’enfance de Jésus, la généalogie, la prédication à Nazareth, l’appel spécial de Pierre, six miracles, dix-neuf paraboles, Zachée, Jésus ridiculisé par Hérode, les disciples sur le chemin d’Emmaüs sont tous des additions importantes de l’évangile selon Luc.
Plan
La matière de Luc s’organise autour de l’idée centrale que Jésus est un membre de l’humanité qui a vécu une vie parfaite et représentative comme le “Fils de l’homme” par la puissance du Saint-Esprit.
LUC ; L’Evangile du Sauveur des hommes
I. La Préface | 1:1-4 |
II. La préparation du Sauveur Les annonces La naissance de Jean La naissance et l’enfance de Jésus | 1:5-2:52 1:5-56 1:57-80 2:1-52 |
III. La Présentation du Sauveur Le ministère de Jean Le Baptême La Généalogie La tentation Le retour en Galilée | 3:1-4:15 3:1-20 3:21,22 3:23-28 4:1-13 4:14,15 |
IV. Le ministère du Sauveur L’annonce de son but La manifestation de sa puissance La nomination de ses aides La déclaration de ses principes Son ministère de compassion La révélation de la croix | 4:16-9:50 4:16-44 5:1-6:11 6:12-19 6:20-49 7:1-9:17 9:18-50 |
V. La mission du Sauveur L’appel public La nomination des soixante-dix L’enseignement du royaume Le développement du conflit public L’instruction des disciples | 9:51-18:30 9:51-62 10:1-24 10:25-13:21 13:22-16:31 17:1-18:30 |
VI. La passion du Sauveur Evénements sur la route de Jérusalem Arrivée à Jérusalem Conflit à Jérusalem Prédictions au sujet de Jérusalem Le dernier souper La trahison L’arrestation et le jugement La crucifixion L’enterrement | 18:31-23:56 10:31-19:27 19:45-21:4 19:45-21:4 21:5-38 22:1-38 22:39-53 22:54-23:25 23:26-49 23:50-56 |
VII. La résurrection du Sauveur Le tombeau vide L’apparition à Emmaüs La manifestation aux disciples La mission L’ascension | 24:1-53 24:1-12 24:13-35 24:36-43 24:44-49 24:50-53 |
La première déclaration de la préface de Luc dit que l’évangile a été écrit pour donner de la certitude au lecteur au sujet des choses qu’il avait apprises oralement. Luc voulait donner une base authentique à Théophile pour approfondir l’enseignement qu’il connaissait déjà en partie. On peut donc supposer qu’il a eu un souci particulier de présenter les faits avec exactitude et qu’il les organiserait de manière à laisser une impression intégrée chez son auditeur.
Dans la section sur la préparation du Sauveur nous trouvons des choses que les autres omettent complètement, Matthieu dit que Jésus est né d’une vierge et raconte l’histoire du point de vue de Joseph, tandis que Luc la raconte du point de vue de Marie. Ni Matthieu ni Marc ne parlent de la naissance de Jean-Baptiste.
La troisième section, l’entrée de Jésus en plein ministère, commence avec la généalogie gui lie Jésus à l’histoire. Il n’était pas une figure religieuse idéalisée mais un membre très réel de l’histoire do l’humanité. La généalogie descend d’Adam plutôt que de la lignée royale. Au sujet de la tentation Luc dit que le diable “acheva toute tentation” comme s’il voulait affirmer gué Jésus avait surmonté toutes les épreuves possibles de l’humanité.
La seule chose qui diffère dans la quatrième section est le sermon à Nazareth où Jésus annonce sa relation avec les prophéties. La cinquième section, au contraire, appartient presque totalement à Luc seul. II n’y a que quelques paragraphes et peu de texte entre 9:51 et 10:30 qui paraissent dans les autres évangiles. On y trouve plusieurs paraboles qui sont uniquement en Luc (Bon Samaritain, riche insensé, figuier stérile, places aux noces, invités aux repas, drachme et fils perdus, économe infidèle, riche et Lazare, pharisien et publicain). Chacune illustre la méthode de Luc utilisant dos matériaux nouveaux pour expliquer la signification de la vie de Christ à ses lecteurs païens.
De même le récit de la passion ressemble beaucoup aux autres relations synoptiques. Il y a des additions qui ajoutent à la qualité de l’information mais qui ne modifient pas la signification ou le progrès du récit. La présentation de la résurrection, pourtant, frappe par sa nouveauté et sa différence. La réalité est la même que dans les autres évangiles mais l’apparition de Jésus aux doux hommes sur le chemin d’Emmaüs donne une fin admirable à cet évangile, qui veut communiquer de la certitude 5 son lecteur. L’actualité de sa mort, le désespoir des disciples, la manifestation inattendue et convaincante de sa présence vivante, son explication des Ecritures et la conviction spirituelle qui les a saisis forment dans leur ensemble une évidence irréfutable que quelque chose de nouveau s’était passé sur la terre, dans la personne du Christ.
Accent
Luc est le plus littéraire des évangiles. Ses récits tels qu’il les a pris sur les lèvres de Jésus ou qu’il les raconte lui-même sont des joyaux d’expressions, son vocabulaire est riche et varié. Il a inclus quatre poèmes ou cantiques dons son œuvre, qui ont été appréciés tout au long dos siècles. Ce livre est surtout historique. Nul autre ne donne les dates comme lui. Nul autre n’essaie de donner un récit aussi complet que lui, même s’il y a des périodes de la vie de Jésus qu’il ne mentionne pas. Sa façon de traiter son sujet n’est pas limitée. Il voit le Christ à travers les yeux d’un cosmopolite. Il est impartial dans le meilleur sens de ce mot. Son histoire n’est pas une chronique ennuyeuse mais une interprétation vivante faite sous l’inspiration du Saint-Esprit.
Le troisième évangile met l’accent sur la doctrine. Il a sûrement hérité cette disposition de Paul. C’est surtout son vocabulaire qui révèle son intérêt et sa connaissance. La personne da Christ, le Fils de Dieu, est présentée quant à sa divinité et son humanité. Le salut y a une place très importante. On trouve le mot “justifier” plusieurs fois. La doctrine du Saint-Esprit reçoit une attention toute spéciale. Il y a plus de références à l’Esprit chez Luc que chez Matthieu et Marc. Tous les principaux personnages reçoivent la puissance de l’Esprit pour accomplir leurs tâches. Jésus a vécu toute sa vie par l’Esprit.
Certaines classes de personnes sont l’objet d’une attention particulière pour Luc. Il parle beaucoup des femmes. Los enfants ont une place plus marquée que d’habitude dans les écrits de l’antiquité. Les pauvres et les opprimés y sont l’objet d’une attention spéciale également. En fait il y a souvent un contraste entre la pauvreté et la richesse dans cet évangile.
Questions et devoirs
Niveau 1 – Etudiez la leçon Répondez aux questions 1-9 Niveau 2 – En addition au travail du niveau 1, Lisez Manley, p 331 – 335 répondez aux questions 10 à 11 Niveau 3 – En addition au travail des premiers niveaux, faites la question 12. |
- Quel est le rôle de la préface de Luc (1:1-4) ? Quelles sont las choses principales qu’elle nous apprend ?
- Qui a écrit le troisième évangile ? Que savons-nous de lui ?
- Quelle est la relation entre Luc et les Actes ?
- Y a-t-il beaucoup de choses an Luc qui ne se trouvent pas dans les autres évangiles ? Donnez quelques exemples.
- Quel est le principe central autour duquel le plan s’organise ?
- Quels sont les accents principaux de Luc ?
- Faites une liste des événements de la naissance de Jésus que Luc seul raconte.
- Trouvez dix passages où Luc parle de Femmes.
- Trouvez trois passages où Luc souligne un contraste entre la pauvreté et la richesse.
- Nous avons dit que “tous les principaux personnages reçoivent la puissance du St-Esprit pour accomplir leur tâche” et que “Jésus a vécu toute sa vie par l’Esprit”. Justifiez ces déclarations par des références.
- Notez que Jésus s’exprime différemment selon qu’il parle aux scribes, aux gens du peuple ou à ses disciples.
- 9:50 nous amène à un moment décisif dans la via de “l’homme parfait”. La division entre ce qui précède dans le livre et ce qui suit est très marquée. Expliquez cette division et sa raison. Notez surtout 9:28-36 et 9:51 en arrivant à vos conclusions.